« Cette délibération a remis en marche le projet d’une manière irréprochable », tonne Me Pascal Antiq pour la défense du maire de la Condamine-Chatelard à l’époque des faits, en cela rejoint par Me Mohand Chibout assurant la défense du premier adjoint, « cette délibération est marquée du sceau de la légalité ».

La Condamine-Chatemard, village de 150 habitants, a été entre septembre 2012 et septembre 2014, le théâtre d’un affaire immobilière suspectée d’être entachée d’irrégularités volontaires, qui valent aux deux élus de l’époque et au gérant d’une société de construction, de comparaître 10 ans après devant la justice pour faux, usage de faux et corruption.

En juin 2011, la commune qui possède la petite station de sports d’hiver Sainte-Anne, envisage d’y faire construire un ensemble d’une vingtaine de chalets destinés à développer l’activité touristique. Un premier projet est rapidement abandonné au profit d’un nouveau plan de construction de 42 chalets avec piscine. Un projet jugé « disproportionné », par le conseil municipal qui le rejette unanimement.

Le 25 février 2012, 22 jours seulement après le refus, « apparaît » une délibération signée seulement par le premier adjoint. Laura Goude représentant le ministère public dénoncera : « il a rédigé sciemment un faux, d’autant qu’aucun des conseillers municipaux ne se rappelle en avoir eu connaissance ». Délibération qui sera suivie d’une demande de permis de construire, qui sera accepté. S’en suivra un acte sous seing privé signé pour un chantier de 480 000 euros, malgré les réserves émises par le notaire.

Un gérant interdit … de gérer !

Nouveau rebondissement en 2014. Le maire est réélu à la tête de la commune de la Condamine. Une nouvelle délibération sera cette fois acceptée par la majorité, et donnera lieu à la signature d’un acte authentique avec la société Sipoma pour la réalisation du projet dont le montant passe à 890 000 euros.

Seul problème, le gérant de la société a été condamné en appel, à 8 ans d’interdiction de gérer une entreprise par le tribunal de Draguignan. Il obtient tout de même un prêt de 700 000 euros, et débute les travaux en juillet 2014. Le chantier s’arrêtera très rapidement et ne verra jamais le jour, les entreprises n’ayant pas été payées. Sipoma sera mise en liquidation. Le permis de construire sera finalement annulé en 2016.

Tandis que la mairie, partie civile, réclamera une somme de 552 000 euros au titre du préjudice matériel et 100 000 euros au titre du préjudice moral, Laura Goude parlera « d’enfumage », pour un projet « pharaonique qui ne devait pas servir les intérêts de la commune mais leurs intérêts personnels ». Elle demandera en répression des peines d’un an avec sursis simple pour les deux élus et des amendes de 2 000 et 5 000 euros, et interdiction d’exercer une fonction publique durant 5 ans. Pour le promoteur, 2 ans assortis d’un sursis probatoire avec obligation de travail et d’indemniser les victimes, une amende de 10 000 euros, et l’interdiction pendant 5 ans d’exercer une activité de gestion.

Le tribunal après délibéré, a relaxé le maire du village au bénéfice du doute. Le premier adjoint est reconnu coupable de faux et de corruption. Il est condamné à 3 ans d’emprisonnement entièrement assortis d’un sursis. Inéligible durant 5 ans, il devra payer à la mairie de la Condamine la somme de 1 000 euros au titre du préjudice moral, et 600 euros pour les frais d’avocats.

Le gérant de la société est reconnu coupable de violation de l’interdiction de gérer et de corruption. Il écope de 2 ans d’emprisonnement, peine aménageable sous bracelet électronique et interdiction de gérer durant 5 ans. Il devra en outre régler à la commune de la Condamine la somme de 1 000 euros au titre du préjudice moral, et  600 euros pour les frais d’avocats.

Bernard AIGROT

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