« La convergence d’intérêts entre des organisations criminelles et la hiérarchie douanière a conduit à un dévoiement des procédures dans un intérêt purement statistique. » C’est l’une des conclusions de l’information judiciaire menée pendant près de quatre ans sous la conduite de la juge d’instruction parisienne Aude Buresi, qui a levé le voile sur les dérives de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), dont l’ancien patron, Jean-Paul Garcia, et cinq cadres comparaissent, lundi 9 mai et pour un mois, devant le tribunal judiciaire de Paris.
Renvoyés pour importation en bande organisée de marchandises contrefaisantes, escroquerie, faux et d’usage de faux, corruption passive ou détournement de fonds publics, ils sont soupçonnés d’avoir organisé de toutes pièces des importations de café contrefait dans le seul but de réaliser de belles saisies, cela en lien avec un aviseur (un indicateur dans le langage douanier) figurant sur la liste noire du bureau central des sources, qui poursuivait parallèlement un trafic de cigarettes sans être inquiété. Des opérations qualifiées de « complètement artificielles » par les magistrats instructeurs et qui, de l’aveu de tous ou presque, n’ont jamais abouti au démantèlement d’un quelconque réseau.
Mise à disposition d’un hangar
Tout commence à l’été 2015 quand ce service-phare de la douane saisit 43 tonnes de café contrefait de la marque L’Or, de Maison du café. Très vite, plusieurs éléments laissent à penser que la DNRED a joué un rôle important dans la logistique – la mise à disposition d’un hangar de stockage notamment – qui a permis l’arrivée de la marchandise. Plus gênant, le rôle d’un certain Zoran Petrovic, un ancien militaire serbe radié du bureau central des sources et par ailleurs mis en cause dans une autre procédure pour trafic de stupéfiants, apparaît central dans l’importation du café contrefait. Il est attendu, lui aussi, sur le banc des prévenus.
Devant l’éventualité d’une mise en cause des douaniers, les gendarmes sont saisis de l’affaire en septembre 2016. Leurs investigations vont mettre au jour comment la DNRED s’est affranchie de toutes les règles en vigueur dans la gestion des aviseurs dans le seul but de faire valoir des chiffres valorisants de saisies, au point que les magistrats pensent aujourd’hui que le trafic était créé de toutes pièces. Magalie Noël, alors directrice adjointe des opérations douanières, a admis, lors de ses auditions, qu’elle avait désormais de « vrais doutes » sur l’existence d’une organisation criminelle à l’origine de ces importations, assurant avoir fait une confiance aveugle à ses chefs.
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