C’est une information de Bloomberg du 18 mai 2022 : Stéphane Charvériat, un partner du BCG arrivé en septembre 2019 de Bain, poursuit aux prud’hommes son ancien employeur. Une audience s’est tenue le mardi 17 mai. Une décision doit intervenir le 11 juillet.
Stéphane Charvériat estime que Bain lui doit la somme de 2 millions de dollars (1,9 million d’euros) en paiement de salaires (1,2 million d’euros) et bonus différés (0,7 million) que le cabinet refuse de lui payer près de trois ans après qu’il a rejoint en septembre 2019 le bureau parisien du Boston Consulting Group en tant que senior partner pour y intégrer la practice retail au niveau européen.
Un non-paiement dont le partner estime qu’il correspond à une forme de sanction pour être passé à la concurrence. « Une punition cachée », a jugé Rémi Chéroux, l’avocat de Stéphane Charvériat lors d’une audience mardi 17 mai 2022. « Ce que Bain ne supporte pas est que Monsieur Charvériat ait quitté le cabinet pour rejoindre un rival », a aussi déclaré l’avocat.
Lui nier le versement de ces rémunérations légitimerait des tactiques de chantage de la part d’entreprises qui cherchent à dissuader leurs collaborateurs clés de partir à la concurrence, a encore plaidé l’avocat dans des propos qui lui sont attribués par Bloomberg.
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Clauses de non-concurrence, de non-sollicitation, courriers d’avocats, envoi d’huissiers, tout est bon pour empêcher ou punir les départs « en grappe » de partners d’un cabinet à l’autre.
En bout de course cependant, dans le conseil en stratégie, les contentieux se bouclent en général par des négociations à l’amiable.
Lors de son embauche au BCG, Stéphane Charvériat arrivait de Bain & Company où il dirigeait l’équipe française du retail et dont il était un consultant depuis 2004 (après avoir collaboré avec Kearney de 1993 à 2004 jusqu’au grade de principal, et chez Roland Berger en 1992 et 1993).
À l’audience, Bain a défendu que, bien que Stéphane Charvériat était salarié de Bain avec un contrat français, ce type de rémunération différée relève d’un contrat séparé assujetti à la législation américaine qui ne peut donc être poursuivi en France.
Frédéric Naquet, l’avocat de Bain, a indiqué que Stéphane Charvériat s’était trompé de cour de justice. « S’il veut cette somme d’argent, il devra aller se battre pour elle dans le Massachusetts », a-t-il déclaré.
Un argument que Stéphane Charvériat et son avocat ont écarté, indiquant qu’aucun document au sujet des rémunérations différées n’avait été signé, qu’aucune clause ne prévoyait un droit de préséance des cours de justice du Massachusetts sur le versement de ces rémunérations et que ces montants, calculés à partir de sa rémunération de partner, devraient être considérés comme une partie de son salaire français et donc assujetti à la loi française.
« Je considère qu’une rémunération différée devrait être soldée le jour du départ de l’entreprise », a déclaré Stéphane Charvériat.
Une autre empoignade rapportée par Bloomberg concerne le versement ou non de 700 000 euros de bonus que Bain conteste, estimant qu’elle est par nature discrétionnaire, et que Stéphane Charvériat juge légitime au titre des six mois travaillés en 2019.
Chez Bain, il avait par exemple conseillé Alexandre Bompard sur l’élaboration de la nouvelle stratégie de Carrefour début 2018. Cette année-là, a-t-il précisé à l’audience, Carrefour a rapporté l’équivalent de 20 millions de dollars (soit environ 19,1 millions d’euros) à Bain. « Stéphane Charvériat demande simplement à ce que son travail soit rémunéré équitablement », a plaidé son avocat Rémi Chéroux.
Pareils cas de conflits entre un cabinet et un ancien partner expérimenté sont rares, mais ils peuvent parfois se produire (relire notre article).
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