«Proche du néant»… C’est par ces mots que Jean-François Krummenacker a résumé, en marge de l’audience solennelle de rentrée du tribunal de commerce de Douai, l’activité enregistrée en 2021 par la juridiction qu’il préside depuis un an. Alors que le nombre de défaillances a atteint un niveau anormalement bas en France en 2021 (27 285 selon la Banque de France, contre une fourchette annuelle habituelle comprise entre 50 000 et 60 000), le Douaisis et le Cambrésis n’ont, il est vrai, pas fait exception. Après avoir chuté de 28,5% entre 2019 et 2020, le nombre de procédures collectives ouvertes par le tribunal de commerce de Douai a encore reculé de 21% l’an dernier, pour tomber à 129.
Peu de procédures confidentielles ont dans le même temps été initiées, comme en témoignent les quatre mandats ad hoc (contre 7 en 2020) et l’unique constat de conciliation (inchangé) recensés en 2021. «Même si toutes les entreprises ne vont pas bien, la plupart d’entre elles sont parvenues à honorer leurs dettes, en partie grâce aux aides publiques et aux prêts garantis par l’Etat (PGE)», constate Jean-François Krummenacker.
Des audiences d’ouverture réduites de moitié
Selon lui, cette situation pourrait perdurer durant le premier semestre, notamment parce que l’Urssaf et l’administration fiscale tendent à prolonger leurs moratoires au profit des professionnels et des entreprises en retard dans le paiement de leurs charges et cotisations. A titre d’illustration, les inscriptions de privilège de sécurité sociale de l’Urssaf sont passées de 321 en 2019 à 68 en 2020, puis à 4 l’an dernier ! Dans ce contexte, le nombre d’audiences d’ouverture de procédures collectives va être divisé par deux d’ici à la fin du mois de mai, avec la tenue d’une session un mardi sur deux. Au-delà, celles-ci rebasculeront toutefois sur un rythme hebdomadaire.
«A un moment, il faudra bien solutionner la question des PGE que de nombreux bénéficiaires ne pourront pas rembourser au regard des montants significatifs alloués», estime Jean-François Krummenacker. La mise en œuvre de restructurations s’annonce d’autant plus probable que «beaucoup d’entreprises n’ont non seulement toujours pas retrouvé leur profitabilité d’avant-crise, mais elles sont en plus aujourd’hui durement affectées par la hausse des prix de l’énergie et des matières premières», poursuit-il.
Un service d’assistance psychologique
Face à cette perspective, le président du tribunal de commerce de Douai appelle donc les dirigeants d’entreprise en difficulté à prendre les devants et à se rapprocher de la juridiction. «Dans cette période très spéciale de pandémie, l’enjeu de la prévention n’aura jamais été aussi déterminant, a ainsi insisté Jean-François Krummenacker dans son discours de rentrée. Dans le cadre de la recherche de la meilleure solution, les échanges avec les chefs d’entreprise ont été nombreux en 2021, constructifs, avec parfois, mais bien trop peu souvent, une participation des experts-comptables et des avocats.»
Outre la prévention, les procédures de règlement amiables, qui sont elles aussi confidentielles, mériteraient d’être davantage exploitées. «Quand bien même leur taux de réussite dépasse 75% – contre l’inverse pour les procédures collectives –, nous avons du mal à sensibiliser les chefs d’entreprise sur l’intérêt d’y recourir», déplore Jean-François Krummenacker. Dans ce souci de mieux accompagner ces derniers, le tribunal de commerce de Douai table enfin sur une montée en puissance de l’association Apesa du Cambrésis et du Douaisis. Créée à son initiative en juin dernier, celle-ci propose aux entrepreneurs un service gratuit d’assistance psychologique. En 2021, quatre d’entre eux ont ainsi fait l’objet d’une prise en charge totale par un psychologue local.
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