Une nouvelle fois la compétence des tribunaux de commerce est au cœur d’un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation (dernièrement, v. Com. 17 nov. 2021, n° 19-50.067 P, Dalloz actualité, 9 déc. 2021, note B. Ferrari ; D. 2021. 2084

; ibid. 2262, chron. S. Barbot, C. Bellino et C. de Cabarrus ; ibid. 2022. 625, obs. N. Fricero ; Rev. sociétés 2022. 185, obs. L. C. Henry ).

L’arrêt ici rapporté a toutefois ceci de particulier que, de prime abord, il ne fait que rappeler un principe bien établi : les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des actions en responsabilité engagées par des sociétés commerciales contre leurs dirigeants. Mais qu’en est-il lorsque cette qualité est incertaine ? Plus précisément, est-ce que le fait pour le tribunal de commerce de se déclarer compétent pour cette action en responsabilité l’oblige, in limine, à rechercher, par exemple, la réunion des critères d’une direction de fait ? À tout le moins, c’est à cette question que devait répondre la Cour de cassation au sein de l’arrêt ici rapporté.

Les faits étant relativement complexes en raison de l’implication de nombreux acteurs, nous nous permettrons d’en relater l’essentiel.

Une société holding détient la totalité des titres de deux filiales : une SARL et une SAS. Chacune de ces deux sociétés est dirigée par la même personne, tantôt comme gérant, tantôt en qualité de président. Cette même personne est par ailleurs associée au sein de la holding à laquelle elle est liée, de surcroît, par un contrat de travail.

Il est malheureusement révoqué de ses deux mandats sociaux pour différents motifs liés à des faits de concurrence déloyale commis au préjudice de la holding et en faveur d’une société tierce dont il est l’associé avec son épouse, laquelle était, en outre, également salariée de la holding. Cette dernière société notifie, d’ailleurs, quelques jours plus tard le licenciement des époux pour faute grave.

Le tribunal de commerce est saisi d’une action en responsabilité engagée par la holding à l’encontre de la société tierce et de ses deux anciens salariés en réparation de divers détournements dont les époux se seraient rendu les auteurs. Or, pour échapper à la juridiction consulaire, les deux anciens salariés invoquaient une exception d’incompétence au profit de la juridiction prud’homale dont ils sont déboutés par le tribunal de commerce. Ils interjettent appel de cette décision, mais ne sont pas plus heureux devant les juges du second degré.

Les époux se pourvoient en cassation.

D’emblée, précisons que les moyens de l’ancien mandataire social sont considérés comme n’étant pas de nature à entraîner la cassation et la haute juridiction rejette son pourvoi.

À ce stade, il ne reste plus alors qu’à analyser les arguments de l’épouse. Selon elle, pour reconnaître la compétence de la juridiction consulaire, la cour d’appel ne pouvait se fonder sur la seule circonstance que les filiales de la société holding lui reprochaient de s’être comportée en dirigeant de fait. Au contraire, pour écarter la compétence de la juridiction prud’homale et reconnaître celle du tribunal de commerce, les juges d’appel auraient dû rechercher si elle s’était effectivement comportée comme un dirigeant de fait ou, au contraire, si elle avait agi dans le cadre de ses fonctions salariées.

Las pour la demanderesse, la Cour de cassation rejette le pourvoi.

La haute juridiction commence par rappeler que les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des actions en responsabilité engagées par des sociétés commerciales contre leurs dirigeants de fait. Or…

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